Il est loin le temps où la santé dans le sport se résumait à soigner les petits bobos et les blessures physiques (et heureusement). Le sujet de la santé mentale gagne en visibilité et en importance grâce aux prises de parole courageuses d’athlètes dans des disciplines très variées. Naomi Osaka au tennis, Simone Biles en gymnastique, Carl Hayman au rugby ou encore le joueur de NBA Kevin Love : ils sont de plus en plus nombreux à révéler leur mal-être.
La pression du résultat, les insultes du public et des fans, l’échec, la recherche de la perfection, la peur de décevoir, les trajectoires de carrière ou l'ultra-médiatisation sont autant de raisons qui peuvent impacter la santé mentale des athlètes. Les chocs physiques aussi peuvent entraîner des problèmes de santé mentale. Fin 2020, une centaine d’anciens joueurs internationaux de rugby ont décidé de porter plainte contre la fédération internationale World Rugby pour une mauvaise prise en charge des commotions subies et une mise en danger de leur santé mentale. Certains d’entre eux souffrent de signes précoces de démence.
"J'ai vraiment l'impression que je porte le poids du monde sur mes épaules. Je sais que je fais souvent comme si la pression ne m'affecte pas mais qu'est-ce que c'est difficile parfois."
- Simone Biles
Parfois encore perçus comme un aveu de faiblesse, les troubles de santé mentale sont un sujet tabou dans le monde du sport : parce que les athlètes ont la chance de vivre de leur passion, l’industrie et la société n’acceptent pas ou difficilement qu’ils puissent eux aussi être touchés par la dépression ou le burn-out.
Mais la multiplication des prises de parole de ces athlètes militants fait bouger les lignes ! Les marques de sport et les sponsors prennent eux aussi position. Et les athlètes sont les premiers à prendre le problème à-bras-le-corps en investissant dans des solutions pour une meilleure prévention et prise en charge de la santé mentale.
Ne parlez plus de sport : parlez de bien-être physique et mental.
Les marques de sport sont de plus en plus nombreuses à changer leur discours et à développer des solutions pour prendre soin de la santé mentale des sportifs. Car accompagner les sportifs, ce n’est pas seulement les aider à atteindre leurs objectifs et à améliorer leur performance, c’est aussi les aider à préserver leur santé mentale.
Ces prises de position comportent des bénéfices en termes d’image de marque, d’attractivité et de crédibilité car les marques peuvent proposer une solution complète et se positionner comme un acteur majeur de la santé globale des sportifs.
La santé mentale a toujours été dans l’ADN d’Asics.
La marque de sportswear propose à ses athlètes partenaires un soutien psychologique avec des experts de la santé mentale. C’est par exemple le cas de la joueuse de tennis et numéro un mondiale, Iga Świątek qui dispose d’une assistance avec une psychologue.
ASICS a ainsi lancé une campagne intitulée “nous voulons gagner, mais pas à tout prix”. Pour renforcer son message, la marque a créé un kit d'assistance pour prendre soin de sa santé mentale au quotidien. L’occasion de réaffirmer son positionnement : un esprit sain dans un corps sain.
La marque de sport est convaincue que l’activité physique joue un rôle essentiel pour améliorer le bien-être mental. Pour le prouver, ils ont lancé une étude mondiale appelée “Mind Uplifter”. Des experts scientifiques munis d’appareils EEG (électroencéphalogramme) ont mesuré et capté les émotions d’athlètes et de sportifs en tous genres pour prouver les bienfaits du mouvement sur l’esprit. Résultats : il suffit de seulement 15 minutes et 9 secondes d'activité physique par jour pour commencer à ressentir les effets positifs sur le mental.
Via son application, Nike Training Club, le géant du sportswear propose une approche holistique du bien-être et encourage les pratiquants de sport à prendre soin de son corps comme de son esprit. Les membres ont accès à des entraînements et conseils pour renforcer leur forme physique mais aussi à des séances de relaxation et/ou méditation pour leur forme mentale.
Nike a également lancé une série de contenus appelée Nike Mind Sets en changeant sa fameuse approche “Just Do It” en “How are you feeling?" pour mettre en avant les bénéfices de l’activité physique pour l’esprit. Le programme se concentre sur le ressenti des membres en les incitant à prendre soin de leur état de forme mentale. Ils ont accès à des fonctionnalités personnalisées, des podcasts pour lutter contre les burn-outs ou des guides audio pour la course et la marche.
New Balance et la marque District Vision (eyewear) n’en sont pas à leur première collaboration. Mais pour le lancement de leur dernière collection en duo, en mars 2022, c’est la santé mentale qui était à l’honneur.
Les deux marques ont lancé une série de cours en ligne “District Vision tapes” sur le bien-être mental pour sensibiliser et éduquer les pratiquants de sport.
Certains de ces cours en ligne abordent le quotidien d'athlètes professionnels telles qu’Emily Sisson ou Brenda Martinez et leurs conseils pour se ressourcer mentalement. Cette approche holistique souligne l’importance de la santé mentale pour pratiquer une activité physique et les bénéfices du sport pour le bien-être.
D’après l’Australian Institute of Sport, 1 athlète sur 3 a déjà expérimenté des symptômes d’anxiété ou de dépression qui nécessitent une prise en charge médicale.
Si les athlètes n’hésitent plus (ou plutôt hésitent moins) à prendre position sur des sujets sociétaux et environnementaux, c’est aussi maintenant le cas sur les enjeux de santé mentale. Certains athlètes ont le courage de prendre la parole pour dévoiler leurs dépressions, leurs burn-outs et leurs angoisses.
Parce qu’ils peuvent engager leur communauté de fans et leurs sponsors, ils sont les meilleurs ambassadeurs pour faire de la santé mentale une priorité dans le monde du sport. Et quand ça ne suffit pas : ils investissent.
Au total, en 2021, les athlètes auraient investi plus de 2,4 milliards de dollars dans des entreprises dédiées à la santé mentale. Un chiffre loin d’être étonnant compte tenu du nombre d’athlètes qui s’emparent du problème.
La star de NBA, Kevin Love, a investi dans Coa qui propose des entraînements pour la santé mentale (“your gym for mental health”). La joueuse américaine de football Megan Rapinoe a investi dans la startup Real qui propose des thérapies en ligne. Le joueur de NFL Richard Sherman avec Nurosene, une plateforme numérique de santé mentale qui a notamment lancé une app dédiée à la performance mentale des athlètes.
Après sa prise de parole sur la santé mentale pendant les Jeux Olympiques de Tokyo, Simone Biles aussi a décidé de s’investir davantage sur le sujet et a rejoint la startup de santé mentale Cerebral en tant que Chief Impact Officer.
La santé mentale est enfin au cœur des préoccupations des acteurs du monde du sport. Longtemps négligé, le bien-être global est sous le feu des projecteurs grâce aux prises de parole des sportifs, premiers concernés par ce problème. C’est aussi un moyen pour eux, d’aborder le problème de santé mentale dans toute la société et d’aider ceux qui en ont besoin à exprimer leur mal-être et à soigner leurs problèmes mentaux.
© Gregory Bull, Associated Press